Histoires de Paris

A chaque coin de rue de Paris, des histoires… souvent revues, réadaptées mais fascinantes

Histoires au détour d'une rue

La manufacture de porcelaine du comte d’Artois

La manufacture de porcelaine du comte d’Artois : belle première princière dans la rue du Faubourg Saint Denis

 

Depuis Louis XIV, une sorte d’amour s’était installée entre le pouvoir royal et la fabrication de la porcelaine française. Après avoir trouvé les manières de faire pour la porcelaine fine, les secrets de la porcelaine chinoise, dite dure, furent percés en Saxe et copiés ensuite en France au XVIIIe siècle.

Sous le règne de Louis XV, encouragé par Madame de Pompadour, la manufacture royale de Sèvres est toute puissante. Cependant, elle doit faire face à la venue progressive de nouveaux talents, de nouveaux secrets qu’elles ne reconnaissaient pas toujours.

Aussi, elle vit se développer juste à la périphérie de Paris des fabriques particulières. Face à la défense des privilèges de la manufacture royale, ces dernières eurent l’idée d’aller chercher la protection de princes haut placés. Le comte d’Artois, frère de Louis XVI et futur Charles X fut de ce là. Nous évoquons ici l’aventure de cette fabrique.

 

 

L’initiative du comte d’Artois

Charles Philippe de France a laissé dans l’histoire plusieurs marques : dernier roi Bourbon du pays, roi le plus vieux à son avènement… Il est aussi le premier prince, sans disposer du titre royal à ce moment-là, à parrainer une manufacture de porcelaine.

Jusqu’alors c’était réservé au roi. Louis XV et Colbert ont encouragé les porcelaines de Saint Cloud. Louis XV s’est chargé de celle de Vincennes, remplacées ensuite par Sèvres. Louis XVI a repris cette dernière.

Cependant, alors qu’il n’est encore que le comte d’Artois, le sieur Bourdon Desplanches vint le voir pour lui demander sa protection. Ce dernier accepte et nous constaterons qu’il le fit avec un certain plaisir.

Il ne tarda pas par être suivi, tout d’abord par Monsieur, l’autre frère du roi mais aussi plus tard la reine elle-même.

 

Les entrepreneurs de la manufacture de porcelaine du comte d’Artois

On imagine bien que ce n’était pas le prince qui gérait la fabrique, ni même la supervisait. Il se contentait de l’autoriser de porter ses initiales, surmontées par la couronne des princes de sang. Et c’était déjà beaucoup, comme pour nous y intéresser s’y longtemps après.

 

Ce fut M. Bourdon Desplanches qui s’installa au 5 de la rue du Faubourg Saint Denis. Comme nous l’enseigne Henry Havard dans son dictionnaire de l’ameublement et de la décoration, Bourdon Desplanches fut plusieurs essais. Ainsi, en 1782, il alimenta sa cuisson avec de la houille, semblant lui apporter un peu de réussite. Il en publia un mémoire pour détailler ses performances.

Cependant, il ne fut guerre en succès dans ses affaires et du céder sa manufacture en 1784 à un certain M. Stala.

Ce dernier dut faire face à la remontrance de la manufacture de Sèvres, tout comme les autres fabricants de porcelaine parisiens. Il protesta et poursuivit ses productions.

Toutefois, l’argent, pour lui aussi, manqua. Il dut se résoudre à vendre certains de ses produits.

Le Journal de Paris du 22 janvier 1790 fit une publication dans ce sens « Vente de porcelaines et biscuits, rue Saint-Honoré, A l’enseigne du Page, vis-A-vis l’ancien hôtel d’Aligre, le jeudi 28 janvier 1790 et jours suivants, quatre heures de relevée ; consistant en quantité considérable de pièces do porcelaines et biscuits de nouvelles formes et de bon goût, provenant de la manufacture du faubourg Saint-Denis, comme soupières de toute  grandeurs, plats ronds et ovales, assiettes, sucriers, pots au lait, bustes et portraits de M. Necker, et généralement tout ce qui concerne le service de table, etc. On trouvera toujours à la manufacture de quoi s’assortir. »

Cela ne suffit pas pour maintenir à flot la fabrique. Les temps sont alors troublés par la Révolution, même si le roi est encore sur le trône.

 

L’ombre de Pierre Hannong dans cette histoire

Pierre Hannong était un spécialiste de la porcelaine. Il était venu de Strasbourg avec des secrets pour imiter la fabrication chinoise et de Meissen, la manufacture saxonne de référence.

Quel rapport avec le comte d’Artois et notre histoire, vous me direz ?

En réalité, il tenta de vendre ses services à la manufacture de Sèvres, sans succès. Aussi, il se lança dans la création de sa propre fabrique. Certains historiens indiquèrent que c’était celle-ci qui fut patronnée par le comte d’Artois. Seulement, ils se firent avoir. En effet, elle était bien installée dans la rue du faubourg Saint Denis, mais au numéro 26 (et non au 5). Il y avait bien deux manufactures de porcelaine rue du Faubourg Saint Denis.

 

Le comte d’Artois avait un véritable intérêt pour la porcelaine. Il parraina plusieurs manufactures, mais nous y reviendrons dans un autre article.

 

Sources bibliographiques :

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