Histoires de Paris

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Histoires d'église

Le recueil des enfants par les Filles de la Charité

Le recueil des enfants par les Filles de la Charité : l’institution pour les enfants trouvés à partir du XVIIe siècle.

 

Au XVIIe siècle, Paris continue sa croissance. Son activité économique est de plus en plus florissante. Elle attire toujours davantage de gens, notamment des anciens habitants des campagnes devant se trouver de nouvelles activités. Dans de nombreux cas, la situation sociale est bien délicate, et les enfants font partie des premières victimes de ces situations.

Avec Christian De la Hubaudière, auteur d’Au Sein de Paris et qui s’est intéressé aux questions de la prise en charge de ces enfants en difficulté, nous revenons sur le recueil réalisé par les Filles de la Charité au XVIIe siècle.

 

Une institution de saint Vincent de Paul

Conscient du besoin social de prendre en charge les enfants sans parents, Vincent de Paul fonde en 1638 l’institution des « Enfants Trouvés », dont il confie le soin et l’éducation à « l’Ordre des Filles de la Charité » qu’il a fondé en 1633, d’abord voué à aider les pauvres malades. A ses débuts logée rue des Boulangers, près de la Porte Saint-Victor, sous la direction de Mlle Legras, l’institution se trouve vite à l’étroit.

Les besoins sont d’autant plus grands que, traitant le mal à la racine, Vincent de Paul fonde, près de l’Hôtel-Dieu et de l’église Saint-Christophe, la « Maison de la Couche » en 1640, vis-à-vis l’église Notre-Dame, où chaque fille-mère peut venir accoucher dans l’anonymat et abandonner son enfant. Il faut donc s’en charger, le nourrir, l’éduquer.

 

L’appui royal

Vu l’accroissement immédiat des effectifs à protéger, Louis XIII contribue personnellement au projet en 1642 pour 4 000 livres, prises sur son domaine de Gonesse, entraînant les dons charitables de la haute société. A sa mort, la Régence poursuit l’œuvre et institue un prélèvement annuel de 8 000 £ sur les 5 grosses fermes dès 1644.

Vincent de Paul a racheté le 8 janvier 1632 l’ancien hôpital de lépreux de Saint-Lazare, proche de l’église Saint-Laurent, afin d’y loger sa récente fondation de « l’Ordre de la Mission » ; il abrite « l’Ordre des Filles de la Charité » à proximité et acquiert en 1645 un groupe de treize maisons dans le Champ-Saint-Laurent pour l’accueil des nouveau-nés et des nourrices sédentaires.

Lorsqu’il meurt en 1660, l’institution est victime de son succès et peine à faire face à ses obligations croissantes, d’autant que l’Hôtel-Dieu voisin lui délègue la charge des enfants légitimes de mères mortes en couches. De plus, toute la banlieue veut profiter de ce service : le Parlement, le 8 février 1663, « interdit d’apporter des enfants trouvés à Paris » sous peine de mettre à contribution les hauts-justiciers des lieux d’origine. Mais rien n’y fait : en 1667 et 1668, diverses ordonnances taxent l’archevêque de Paris, les religieux de Saint-Germain-des-Prés, et des chapitres d’églises qui se déchargent de leurs devoirs sur l’institution parisienne, à 15 000 livres annuelles. En 1665, les sœurs de la Charité, devant les abus, refusent les petits envoyés par l’Hôtel-Dieu à la Maison de la Couche.

 

Une institution malheureusement victime de son succès

Malgré tous les dons, les fondations pieuses, les expédients, les sœurs de la Charité doivent demander des secours royaux, car la charge financière est trop lourde et, par édit de juin 1670, l’État prend le relais de l’initiative individuelle, unissant la gestion des Enfants Trouvés à celle de l’Hôpital Général créé en 1656. De nouvelles acquisitions permettent d’agrandir les locaux : la Maison de la Couche s’accroît en 1672 de la maison de la Marguerite et en 1688 de la maison de l’Image Saint-Victor, toutes deux la jouxtant dans la rue Neuve Notre-Dame, et une grande maison avec ses dépendances dans le faubourg Saint-Antoine, s’accédant par la rue de Charenton, voisine de l’Hôpital Général. On y place les enfants de plus de trois ans, revenus de nourrice.

 

La situation inextricable du XVIIIe siècle

A partir de 1745, la Maison de la Couche s’avérant notoirement insuffisante face aux arrivées de filles-mères de la province, en plus des Parisiennes, et le nombre de naissances illégitimes allant toujours croissant, on acquiert et on abat de nombreuses maisons de la rue Neuve Notre-Dame et de la rue Saint-Christophe, ainsi que les églises Sainte-Geneviève-des-Ardents et Saint-Christophe, afin de reconstruire un grand hôpital avec chapelle destiné à l’accueil de ces jeunes femmes et de leurs nourrissons.

Mais en 1780, il faudra tout recommencer et repousser les murs, tant les demandes affluent. De nouveaux édifices remplaceront les anciens, pour faire toujours plus grand, plus haut, plus spacieux, avec des capacités d’accueil toujours plus élevées. Ce n’est pas tant le fruit de la misère qu’accueille cet hôpital parisien. En effet six enfants sur sept qui y sont accueillis sont nés hors mariage.

 

Sources bibliographiques :

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