Confrontation d’un assassin avec sa victime à la morgue
Confrontation d’un assassin avec sa victime à la morgue : quand la foule curieuse assiste à un interrogatoire
Les parisiens venaient à la morgue comme au théâtre. Pour se rassurer quand ils n’avaient plus de nouvelles d’un proche, mais aussi pour assouvir leur soif de curiosité.
L’histoire que nous vous racontons aujourd’hui se passe en avril 1880.
A la suite du curage d’une fosse d’aisance, on trouva des « débris humains » comme le rapporte le Petit Journal du 20 avril 1880. Dans cette affaire criminelle, le responsable est identifié : Louis Monesclou.
Au milieu de la nuit, ces restes humains ont été transférés à la morgue.
La foule devant la morgue
Comme l’indique le journal, « dés huit heures du matin, une foule considérable stationnait aux alentours de la morgue où un service d’ordre, organisé par M. Leclerc, officier de la paix du quatrième arrondissement maintenait les curieux à distance. »
Les curieux… le ton est donné.
« La foule attendait avec une impatience fiévreuse l’arrivée de l’assassin de la pauvre petite Louise Deu, qui devait être confrontée avec les débris de sa victime. »
Arrivée du suspect
« A dix heures précises, Louis Monesclou, extrait de sa cellule, est monté dans le fiacre n° 8 363, placé entre ses agents, ayant en face de lui MM. Clément, commissaire aux délégations, et Macé, chef de la sûreté.
Louis Monesclou était pâle, presque livide. Ses cheveux abondants, incultes, lui tombaient presque sur les yeux, débordant la coiffe de sa casquette.
Il est affreusement maigre et porte, sur sa joue droite, des érosions résultant de maladies anciennes.
Tout l’aspect de sa physionomie est repoussant et ses yeux gris, qui papillotent dans le vide sans oser se fixer sur personne, témoignent de la crainte qu’on y lise ce qui se passe au fond de son âme, car le misérable a le pressentiment qu’il va être amené devant le cadavre mutilé de sa victime.
A dix heures et quart, le fiacre amenant l’assassin entre par la grille de la morgue.
En descendant du fiacre, Louis Monesclou jette autour de lui des regards effarés, s’arrête un instant sans vouloir pénétrer dans la salle des morts, mais M. Macé fait signe aux agents qui, le prenant chacun par un bras, le font entrer. »
La confrontation publique
Dans la salle, le procureur de la République Delise, le juge d’instruction Ragon, le chef de la police municipale Cabon, ainsi que les médecins légistes Bouardel et Descout l’attendaient.
On fait asseoir le suspect devant une « vaste table sur laquelle était recouverte le panneau portant les débris humains de Louise Deu. »
Une voix forte prononça les mots suivants : « Vous avez été amené ici afin d’être mis en présence des débris de votre victime, et pour que vous prêtiez serment sur ce cadavre de nous dire toute la vérité sur l’horrible crime que vous avez commis. »
Ensuite, on retira les draps couvrant les restes.
« A l’aspect de ces débris, hideusement mutilés, le misérable fut pris d’un tremblement convulsif et par un mouvement rapide comme l’éclair, il baissa sa tête sur sa poitrine, d’où s’échappa un cri rauque, sauvage, suivi de hoquets et de sanglots… Puis il porta ses mains devant ses yeux comme pour se dérober à tout jamais de l’affreuse vision de son crime.
Rapidement, le suspect reconnu les faits, indiquant l’avoir tué car « elle ne voulait pas prendre la branche de lilas » qu’il lui offrait.
La suite de l’interrogatoire se fit dans une zone non ouverte au public. Après avoir juré sur le cadavre, il fut emporté dans la salle du greffe.
La sortie de la morgue
Une fois l’interrogatoire, le suspect est ramené dans le fiacre qui l’attendait. Il n’était pas seul ! La foule aussi l’attendait, en se ruant sur la voiture et en poussant des cris : « A mort ! »
Cette ambiance suivit le convoi jusqu’au coin de Notre Dame.