Histoires de Paris

A chaque coin de rue de Paris, des histoires… souvent revues, réadaptées mais fascinantes

Histoires au détour d'une rue

Les photographies menacées par la neige

Les photographies menacées par la neige : une collection qui risque l’ensevelissement par la tourmente de 1879

 

Au début de décembre 1879, Paris croule sous la neige. Il y en a partout. Elle s’infiltre dans tous les endroits, s’accumulant dans les rues, sur les toits.

Evidemment, dans ce contexte, tout est réuni pour favoriser des accidents. Ce fut le cas, on peut l’imaginer sur les rues, mais certains bâtiments ne supportèrent pas le nouveau poids.

C’est ainsi qu’un entrepôt à l’angle de la place Cadet et de la rue Lamartine menaçait.

 

Un entrepôt un peu spécial

Pierre Petit était photographe de ses états. Il avait là son atelier et dans ses annexes, il conservait de nombreuses épreuves.

Elles n’étaient pas toutes de lui. En effet, comme le rapporte le Petit Journal du 7 décembre 1879, on y stockait, depuis 1855, les photographies de toutes les personnalités célèbres. Ici, venaient piocher pour leurs besoins, les différents journaux illustrés.

Ainsi, on comptait au moment de l’accident près de 12 000 clichés. C’était donc une véritable richesse qui était conservée dans cet entrepôt (et qui mérite cette histoire).

 

Un bâtiment qui se trouve sous la neige

Pour nous replonger dans l’évènement, laissons la parole au journaliste du Petit Journal du 7 décembre 1879 nous rapporter la situation.

« A huit heures du matin, le vitrage formé d’épais carreaux et d’une armature de fer, cédait partout sous le poids d’une masse de neige de plus d’un mètre de hauteur.

Ici se place la série des incidents annoncés : les constructions sur lesquelles venait de s’effondrer cette lourde masse sont légères ; elles sont en outre surmontées, en retour, de deux étages de constructions semblables. Un éboulement d’une partie de la maison était fortement à craindre.

Le moyen de l’éviter était de débarrasser de la neige les parties effondrées.

Mais il y a un règlement qui défend de jeter dans la rue les neiges amoncelées sur les constructions, le règlement n’a oublié que le cas où un sinistre pouvait se produire ! » 

Vous imaginez l’histoire se poursuivre !

Bien sûr, il y avait les contraintes administratives. Rappelons-nous tout de même que les rues étaient noyées sous la neige. Les services de la ville, même en embauchant à tour de bras n’avaient pas les moyens de tout nettoyer. Si, on y rajoutait la neige venue des toits, la situation serait davantage ingérable.

 

Tentatives de discussions avec l’administration

Aussi, notre photographe se précipita pour obtenir l’autorisation de déneiger son toit. L’imbroglio n’était pas terminé

« M. Pierre Petit courut chez le commissaire de police ; qui se déclara incompétent et le renvoya à la mairie (bureau de la voirie) ; là on le renvoya à l’ingénieur du 10e arrondissement (la maison se trouve dans le 9e). M. l’ingénieur était absent ; après de nouvelles démarches on adresse M. Pierre Petit à l’ingénieur en chef, avenue Victoria, qui déclina à son tour sa compétence et le renvoya à M. de Royon, commissaire-voyer. Ce dernier était absent, occupé sur la voie de Saint-Germain.

Et nulle part un employé, un chef de service remplaçant les chefs ! »

Que faire ? Le temps ne jouait pas en faveur de notre photographe contraint à ce jeu de cache-cache.

 

Opération de sauvetage finale

« Et chaque minute augmentait les dangers d’écroulement. : Lassé de ces démarches et voulant éviter un malheur, M. Pierre Petit se décida à faire enlever d’office, par ses employés et domestiques, l’amas dangereux en faisant interrompre la circulation sur le trottoir.

Les clichés, recouverts tous de boîtes, ont pu être retirés de la neige. »

La neige fut retirée du toit et se retrouva dans la rue. Mais finalement l’accident était évité et la formidable collection conservée.

 

Sources bibliographiques :

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