Le collège d’Harcourt au XVIIIe siècle
Le collège d’Harcourt au XVIIIe siècle, entre luttes d’influence et pris par l’ouverture de l’enseignement…
Au cours du XVIIe siècle, le collège d’Harcourt retrouva une grande prospérité. Si belle qu’elle aboutit au début du siècle suivant à des discussions sur son usage au sein de l’institution.
La lutte entre le proviseur et les élèves
En 1701, Jean de la Brière de Louvancy prend la direction du collège d’Harcourt.
Ce siècle démarra par une grande aisance pour Harcourt. Aussi, les boursiers en profitaient. Ils n’hésitèrent pas à affronter le proviseur, au travers de nombre de réclamations.
Ils profitèrent de la manière dont il avait été désigné. En effet, son prédécesseur voulut organiser sa succession et appela Louvancy à ses côtés pour lui succéder. Ce n’était pas tellement dans les habitudes de l’institution. En effet, c’était aux grands boursiers de choisir celui qui les dirigerait. Ne pouvant le démettre, ils tentèrent de lui retirer des possibilités d’administrations.
Ainsi, ils voulurent lui retirer la possibilité de désigner le bibliothécaire, ils demandèrent des pensions plus grandes… Ils cherchèrent à dresser une liste des dépenses pour montrer à quel point le proviseur détournait les revenus de l’institution. Tout y passa, comme la tenue du jardin, de ses vêtements. Ils expliquèrent que le proviseur maintenait des portes cachées pour se déplacer dans tous les bâtiments.
Intervention de la force publique pour chercher à diminuer les distractions
Dans ces temps prospères, les divertissements étaient nombreux à Harcourt. Ainsi, les étudiants profitaient des billards, du jeu du palet, de paume, de ballons, aux barres… La situation était telle qu’elle fut dénoncée lors de la visite de 1703 voulue par Louis XIV.
Alors des nouvelles règles furent données et le proviseur confirmé. Ainsi, un boursier ne pouvait avoir plus de 150 livres de rente. Ensuite, le temps des études fut rappelé : 3 ans pour les artiens, 5 ans pour les théologiens…
Une seconde visite fut réalisée en 1707. On demanda alors au proviseur d’organiser une assemblée pour suivre l’avancement des étudiants, mais aussi assurer la religiosité de ses ouailles, visiter les classes et faire l’inventaire des biens.
Après les élèves, des luttes avec la paroisse à proximité et l’autorité de tutelle au sein de l’Université
Le proviseur voulut également s’affranchir totalement de la cure de Saint Hilaire. D’ailleurs, déjà en 1674, le curé de la paroisse avait du se défendre contre les velléités de celui de Saint Côme. Mais il avait obtenu gain de cause devant le Parlement en 1678. Aussi, au début des années 1710, le proviseur voulut empêcher le prélat de Saint Hilaire de venir diriger la messe dans sa chapelle.
Il affronta également la nation de Normandie, institution de l’Université dont le collège d’Harcourt dépendait. En effet, en raison de sa volonté refusée par la nation de révoquer un professeur, il se mit ouvertement contre elle. Il alla jusqu’à refuser à ce que les assemblées de la nation se fasse à Harcourt comme par le passé.
Avec Dagoumer, le collège d’Harcourt est au cœur de la direction de l’Université mais aussi de la Cour
En 1713, le proviseur meurt brutalement. Dagoumer est désigné pour lui succéder. Celui-ci se réconcilie avec la nation de Normandie et rouvre son établissement à ses assemblées et ses messes.
Cependant, les boursiers reprennent leur lutte contre l’ancien proviseur, même mort.
Dagoumer, certes cartésien, fut à plusieurs reprises recteur de l’Université de Paris. Il parvint à maintenir l’influence de l’Université au-dessus des académies, malgré les volontés royales. A ce propos, le collège d’Harcourt fit partie des institutions très démonstratrices de leur joie de voir la paix revenir. En effet, 1713 est l’année du traité d’Utrecht et marque la fin de la guerre. Ainsi, il réussit à jouir d’une véritable influence politique.
Une nouvelle réforme de l’enseignement et ouverture des classes de philosophie
Le proviseur dut affronter en 1724 à la volonté du duc de Bourbon de rendre gratuit et obligatoire l’enseignement. En effet, le ministre demanda alors à tous les procureurs de disposer de la liste de tous les enfants qui n’allaient pas à l’école afin de poursuivre leurs parents ou tuteurs.
En outre, le français commençait à prendre une place dans l’enseignement. Fini les cours uniquement en latin et en grec. Les leçons de philosophie dépassaient Aristote pour regarder aussi Descartes, qui avait été rejeté jusqu’alors. Sur ce plan, cela plaisait à Dagoumer qui était un fervent défenseur du cartésianisme.
Il quitta le collège en 1730, pour se retirer à Courbevoie, dans une petite maison des Pénitents. Il y mourut en 1745, à 85 ans.
Harcourt et le Concours général de l’Université
Le successeur de Dagoumer fut Gilles Asselin. Il resta proviseur de 1730 à 1762. Ce prélat avait un goût poussé pour la poésie et à ce titre reçut pour cadeau de Voltaire une de ses premières tragédies : la Mort de César. D’ailleurs, la pièce fut jouée dans le collège et y trouva un meilleur succès qu’à la Comédie Française.
Diderot, après avoir été un élève des jésuites, rejoignit d’Harcourt pour finir ses études.
En 1747, l’Université lança la distribution des prix du Concours général, à partir des fonds d’un chanoine de Notre Dame de Paris, l’abbé Le Gendre. Dans les archives du collège d’Harcourt, se trouvaient des procès verbaux de ce concours. Jusqu’à sa suppression, en 1793, 9 étudiants d’Harcourt furent primés. Il fut le second collège de Paris, après celui du Plessis Sorbonne. Le prémier harcourien primé obtint le sésame en 1750.
En 1754, le collège fut une nouvelle fois inspecté. L’objet n’était plus la discipline mais l’inventaire pour une taxe exceptionnelle. Il fallut que le collège déclara tous ses biens.
Tout de même, le proviseur quitta en 1762, un établissement très prospère.