Histoires de Paris

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Histoires de quartier

Rupture d’égout à la porte de Clichy de 1910

Rupture d’égout à la porte de Clichy de 1910 : si loin des rives de la Seine en crue, mais bien dangereuse…

La porte de Clichy est située au Nord de Paris, bien loin de la Seine. Là, on peut s’imaginer que le quartier était à l’abri des caprices du fleuve en cette fin janvier 1910. C’est aussi ce que pensaient les habitants.

Et pourtant, le lieu avait un point faible : un point bas au niveau du réseau des égouts. En effet, du fait de leur position souterraine et en liaison avec le fleuve, les égouts permirent dans de nombreux endroits à faire parvenir l’inondation bien loin des rives.

L’égout de Clichy fortement soumis à la tension venue de la Seine en crue

Avec la montée des eaux de la Seine, lors de la crue de 1910, les égouts se retrouvèrent en première ligne. Notamment par les sorties qui les relient au fleuve, et les nombreuses infiltrations dans le sol.

Ce d’autant, qu’à un moment, le niveau de l’eau à l’intérieur des égouts se mit à suivre directement celui du fleuve, comme le rapporte le Radical du 26 janvier 1910 :

« Le régime des égouts s’est établi définitivement au niveau du fleuve, ce qui explique l’inondation d’un grand nombre de caves par les canalisations intérieures peu résistantes des propriétés »

Rupture de l’égout et envahissement des trottoirs

Du fait de la quantité d’eau, une très forte pression s’exerçait sur les bordures des canalisations. Plus l’eau de la Seine montait, plus la tension progressait. A tel point que la rupture se produisit à proximité de la porte de Clichy, non loin des fossés des fortifications. Le Radical rapporte la situation le 26 janvier 1910 :

« A la porte de Clichy, par suite de la rupture d’un égout, l’eau a envahi les trottoirs et s’est répandue dans les fossés des fortifications où des fissures sont à craindre. »

Surprise pour les habitants du quartier qui ne pouvaient pas imaginer une situation pareille !

Récit par le Matin du 27 janvier :

« Avant-hier, les gens qui habitaient à la porte de Clichy se croyaient sûr de demeurer sauf. Hier, l’égout collecteur de Clichy éclatait, et l’inondation montait. »

Précisions sur l’évènement

Grâce au journaliste, on en sait davantage.

« Le premier a eu lieu un peu en dehors de l’enceinte des fortifications, boulevard national. L’égout collecteur, qui suit souterrainement le boulevard tout entier, franchit de gauche à droite la chaussée, à une vingtaine de mètres après la porte, se dirige ensuite vers la plaine de Clichy, a éclaté hier matin, vers onze heures vingt. La rupture s’est produite dans les fossés des fortifications. L’eau qui s’y trouvait déjà accumulée haussa de niveau avec une rapidité inquiétante. »

Une fois la rupture réalisée, elle s’élargit bien vite et il fallut organiser des secours.  

« Bientôt, on constat une large fissure sur le trottoir de gauche à une trentaine de mètres après la porte de Clichy. Un service d’ordre fut immédiatement organisé par M. Heunepaux, inspecteur principal du dix-septième arrondissement. Les portes furent fermées aux véhicules de toutes sortes ; seuls les piétons furent admis à passer sur une étroite bande de terrain réservée au milieu de la chaussée.

On ne cessa durant la soirée de surveiller la montée des eaux ; on craignait, en effet, si la crue de la Seine augmentait que la chaussée toute entière n’éclatât sous la formidable pression des eaux.

La rupture de ce matin a soulagé dans une certaine mesure l’effort des voûtes, mais on redoute néanmoins de nouveaux éclatements sous la chaussée même. »

Une inquiétude demeurait :

« Si la Seine haussait encore, on se trouverait dans la nécessité d’interdire même aux piétons l’accès de la porte de Clichy. »

Conséquences sur les télécommunications

Du fait des inondations et de la crue, de nombreux parisiens se retrouvaient sans téléphone. De nombreux câbles passaient par les égouts. Aussi, régulièrement, les journaux faisaient un point sur le nombre d’abonnés sans téléphones.

Le Petit Parisien, dans ses colonnes du 27 janvier 1910, fait alors un point de situation.

« Hier soir, le nombre total d’abonnés des téléphones dont les communications sont interrompues, à Paris, s’élevait à 5 057, se répartissant comme suit : Gutenberg : 1 517, Chaudron : 32, Roquette : 948, Port Royal : 730, Passy : 250, Saxe : 1 350, Wagram : 230. »

Un bureau tout d’un coup prenait de l’importance dans ces chiffres : Gutenberg. Le journaliste donna alors la raison des troubles pour celui-ci :  

« L’accroissement du nombre de lignes téléphoniques interrompues au bureau de Gutenberg est dû à la rupture de l’égout de Clichy. « 

Cette inondation à la porte de Clichy montra que les impacts de la crue pouvaient toucher une très grande partie de la ville, en profitant d’un point faible : le réseau des égouts.

Sources bibliographiques :

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