Histoires de Paris

A chaque coin de rue de Paris, des histoires… souvent revues, réadaptées mais fascinantes

Histoires d'immeubles

L’atelier de Carpeaux

L’atelier de Carpeaux, immeuble signé Hector Guimard, réalisé en souvenir du grand sculpteur du second Empire

 

Etrange histoire que celle de ce bâtiment, l’atelier de Carpeaux, situé au 39 boulevard Excelmans le 16e arrondissement de Paris. Il mélange en effet deux grands noms de la fin du XIXe siècle : Jean Baptiste Carpeaux, fer de lance des statues grandioses de Napoléon III et Hector Guimard, l’icône de l’Art nouveau à Paris.

Découvrons plus en avant cette histoire !

Ne pas de se fier aux apparences !

Ici, il ne faut pas fier au nom du bâtiment. Le bâtiment ne fut jamais occupé par Jean Baptiste Carpeaux. Il lui servit encore moins d’atelier.

En effet, le sculpteur des statues situées devant l’Opéra Garnier à Paris avait installé ses outils au 25 du même boulevard.

Toutefois, afin d’asseoir son souvenir et sa mémoire, sa veuve décide en 1895 de dédier l’immeuble actuel à l’atelier de Carpeaux. Nous étions alors 20 ans après la mort de l’artiste.

Pour ce faire, elle en confie la réalisation à l’architecte montant de l’époque : Hector Guimard.

Le combat d’une veuve

Un an avant sa mort en 1875, Jean Baptiste Carpeaux se sépare de sa femme, sans rompre totalement le mariage. Après s’être marié en 1869, le couple avait donné naissance à 3 enfants. Cependant, au moment de la séparation, Carpeaux décide de sortir de son héritage toute sa famille.

L’artiste meurt peu de temps après, laissant une veuve de 26 ans. Commence alors, pour la jeune femme un véritable combat pour récupérer ses droits, ce d’autant que Carpeaux avait laissé dire que les derniers enfants n’étaient pas de lui.

De ce fait, elle du se battre pour garder la garde de ses enfants, tout en essayant de récupérer des biens.

Une première grande maison

Pourtant en 1869, tout avait bien commencé. Ils avaient acheté un terrain à Auteuil. Ici, ils firent construire une véritable chateau de style Second Empire, avec une tour octogonale de deux étages, terminée par une terrasse à l’italienne.

Après la mort de l’artiste, la veuve dut faire face à de nombreux créanciers, vendant à de nombreuses reprises des biens qui avaient été accumulés.

En tout état de cause, cette demeure est essentielle pour Amélie Carpeaux, qui fit reprendre son plan pour la construction d’une maison à Houlgate, la villa Flore, en 1885

La première conversion de l’atelier

En 1888, Amélie Carpeaux fit modifier l’atelier de son mari, qui était situé à l’extrémité de la propriété. Son objectif était d’y installer un appartement indépendant.

Il fut peut être destiné à héberger Charles Carpeaux, tout juste âgé de 18 ans. Le bâtiment était parfait pour un célibataire, avec sa chambre, le salon, la salle à manger, une bibliothèque et la cuisine à l’étage.

La trace d’Hector Guimard 

Une seconde transformation fut conduite en 1894 – 1895. C’est là que Hector Guimard intervient. L’architecte a alors 28 ans. 

En tout état de cause, on lui doit la surélévation faite de briques et avec une grande ouverture vitrée. Il fit rajouter également les deux belles sculptures sur les côtés de la façade principale. Ce second étage est également accessible par un escalier extérieur.

A cette date, la veuve Carpeaux était davantage sereine sur sa situation financière. Elle pouvait retrouver la bonne société. Ainsi, on transforma le rez-de-chaussée en salle de réception. Ici, on plaça de nombreuses oeuvre de Carpeaux, essentielle pour la représentation sociale de la famille.

On fêta même l’inauguration de ce nouvel atelier, en organisant une grande danse, en face d’une image de la célèbre oeuvre faite pour l’Opéra.

Seul vestige de la propriété des Carpeaux

En 1898, la famille Carpeaux fait détruire le grand hôtel. Il est possible qu’on envisagea d’y installer une autre bâtisse. Des esquisses furent réalisées à cet effet par Hector Guimard. Mais la commande fut annulée.  De fait, Amélie Carpeaux se replia sur l’atelier

Mort d’Amélie Carpeaux

En 1904, Charles Carpeaux meurt à 33 ans à Saigon. C’est une véritable épreuve pour Amélie Carpeaux.

Elle décida d’exposer le corps de son fils dans l’atelier avant l’inhumation à Auteuil. La mère se retira totalement ensuite de la vie mondaine. Elle mourut en 1908.

La dispersion des œuvres de l’atelier en 1913

Peu de temps avant le début de la Grande guerre, eut lieu une vente particulière : celle des sculptures de l’ atelier de Carpeaux. A la demande des deux derniers enfants du sculpteur, l’atelier est dispersé lors d’une vente aux enchères. Alors de nombreuses traces du travail de Jean Baptiste Carpeaux sont vendues. Cet épisode s’inscrivit dans une grande tension entre les deux enfants de Carpeaux. En effet, Amélie avait privilégié sa fille au détriment de son fils, dont elle trouva la vie trop dissolue.

Il reste toutefois un beau catalogue, conservé à la Bibliothèque Nationale de France. On peut y admirer entre autres les tests pour la fameuse Danse de l’Opéra ou le groupe Ugolin et ses enfants.

Après la mort de Louis Carpeaux en 1929, Louise Clément Carpeaux fut la dernière de la famille. Depuis 1910, elle était la seule propriétaire de ce qui restait de la propriété d’Auteuil. Aussi, elle fit réaménager l’atelier pour y vivre avec son époux en 1914.

Sources bibliographiques :