Histoires de Paris

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Histoires de Seine

Le pont des Arts face à la débâcle de 1880

Le pont des Arts face à la débâcle de 1880 : quand des poutres s’accumulent à ses pieds et menace l’ensemble.

 

Durant le terrible hiver 1879 – 1880, les éléments se déchainent à Paris. Un froid glacial et infernal s’installe dès décembre, gelant tout sur son passage. Même la Seine cessa de couler, prise dans un étau de glace.

Puis, à la faveur du redoux, tout se remit en mouvement. Et très brutalement ! Les morceaux de glace étaient nombreux et tranchants. Et ils filaient le long de la Seine. Gare à tout ce qui pouvait les gêner !

Les ponts étaient ainsi en première ligne. Pour le pont des Arts, ce ne fut pas une sinécure.

 

Les premières craintes sur le pont des Arts

Ce pont ne fut pas le premier touché par le péril des glaces. En effet, en bois, provisoire, la passerelle qui doublait le pont des Invalides en cours de rénovation fut la première fauchée par les glaces.

Mais rapidement, comme nous pouvons le lire dans le Petit Journal du 4 janvier 1880, l’inquiétude concerne également le pont des Arts.

« A dix heures du soir, l’amoncellement des glaces ne laissait que peu d’espoir de sauvegarder le reste de la passerelle. De l’ancien pont des Invalides, les ingénieurs éclairent la passerelle avec la lumière électrique afin de prendre les mesures nécessaires. Au pont des Arts, on éprouve également de grandes craintes : le choc des glaçons est perceptible du parapet où tout stationnement est interdit. Les pompiers y restent en permanence. »

 

La terreur en lien avec l’écluse de la Monnaie

Puis le danger se rapproche toujours plus près. A son tour, l’écluse de la Monnaie qui régulait le niveau du petit bras de la Seine est à son tour gravement endommagée. Situé directement en aval, le pont des Arts reçoit ce nouveau flux d’eau et de débris.

Compte rendu du Petit Journal du 5 janvier 1880 :

« La terreur, très grande partout, atteint sur le quai Napoléon son maximum d’intensité ; les habitants déménagent, se rappelant qu’il y a trois ans un écroulement s’est produit, et redoutent le retour d’un semblable accident.

Un cadavre entièrement déchiqueté par les glaçons a été repêché par un sapeur-pompier entre le pont des Arts et celui des Saints-Pères. C’est le cadavre d’un homme d’une quarantaine d’années ; son linge est marqué ; P. D. »

 

L’arrêt de la circulation et l’évacuation de poutres qui s’étaient accumulés

Aussi, dans ces conditions, comment garantir la sécurité pour les passants ?

« A partir de midi, la circulation a été interdite aux piétons sur plusieurs ponts, savoir : les ponts des Arts, des Saints-Pères, de Solferino et la passerelle du Trocadéro. »

Mais les glaçons ne sont pas les plus à craindre !

« Au pont des Arts, une grande quantité de poutres s’était amassée contre les piles du milieu ; La secousse a été tellement forte qu’on voyait osciller le pont. Le même fait s’est produit au pont des Saints Pères »

Ces poutres provenaient de l’amont, probablement de bateaux déchiquetés et emportés par la débâcle.

Il faut donc s’activer pour les retirer, comme le détaille le Petit Journal du 6 janvier 1880.

« Au pont des Arts, des ouvriers sont occupés à chasser les poutres, qui se trouvent contre les piles du milieu : ce travail, assez dangereux est cause de l’interdiction du passage.

Les piétons passent au pont des Saints-Pères ; mais la circulation reste suspendue pour les voitures et les omnibus, qui doivent prendre le pont Royal. »

 

Une circulation toujours fermée mais qui n’empêche pas les curieux

Toutefois, le parisien est particulièrement curieux. Rien ne l’empêche de venir voir le spectacle. Témoignage issu du Petit Journal du 7 janvier 1880.

« Le pont des Arts, est resté interdit aux piétons, jusqu’à midi ; à partir de ce moment également, les omnibus ont repris leur itinéraire ordinaire par les ponts de Solferino et des Saints-Pères, qui avaient été livrés aux piétons. La foule des curieux est toujours très grande. Dans l’après-midi, on voyait sur le fleuve quelques barques de pêcheurs. »

 

Sources bibliographiques :

 

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