Histoires de Paris

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Histoires au détour d'une rue

La manufacture de porcelaine de la Courtille

La manufacture de porcelaine de la Courtille : des manifiques objets imitant la fabrique de Meissen en Saxe !

 

Connaissez-vous la Courtille ? Il s’agit d’un quartier en bas de Belleville. Aux XVIIIe et XIXe siècles, il était célèbre pour sa barrière où de nombreuses guinguettes animaient les dimanches populaires. On peut citer bien sûr le Carnaval, dont le dernier acte du mardi gras avait lieu au cours de la Descente de la Courtille.

Nous sommes donc dans un lieu éminemment ouvrier. Aussi, point surprenant d’y voir fleurir des fabriques, notamment dès le dernier tiers du XVIIIe siècle. Aujourd’hui, nous allons évoquer la manufacture de porcelaine de la Courtille.

 

Un quartier avec plusieurs manufactures de porcelaine

Dans les années 1770 et 1780, Paris voit apparaître des nouvelles manufactures de porcelaine. Alimentés par des nouvelles techniques, cherchant toujours à imiter les œuvres chinoises et de Saxe, des entrepreneurs se lancent, en espérant pouvoir vendre leurs productions aux personnalités riches de la ville et de la Cour.

Il se trouve, comme nous allons le lire dans le Figaro du 13 juillet 1891, que plusieurs avaient choisi ce quartier du Nord Est parisien pour s’établir.

« Un peu plus tard, on fait près de cet emplacement une curieuse trouvaille, une terre spéciale, un kaolin qui va jouer un grand rôle dans l’art industriel. C’est lui en effet qui fournit aux fabricants de porcelaine dure un élément précieux pour confectionner la porcelaine de Paris, dont bien des spécimens sont aujourd’hui confondus avec des produits de Saxe, par la beauté de la pâte, la perfection de la forme, et aussi souvent par la marque de fabrique. Les rues de Crussol, Fontaine-au Roi, Folie-Méricourt, la Courtille, Belleville, Charonne, la rue de la Roquette, etc., voient s’ouvrir partout des ateliers et chauffer des moufles. »

 

La manufacture de la Courtille, tenue par un certain Jean-Baptiste Locré se détache.

« Je ne citerai parmi ces nombreux fabricants artistes que Locré ; celui-ci marque d’abord ses porcelaines de deux flambeaux qui se croisent, puis de deux épis disposés de même et pris, trop souvent, pour les fameuses épées de Saxe. »

 

La fondation de la manufacture

Ainsi que nous l’apprend Charles Ernest Guignet dans son traité sur la céramique ancienne, la manufacture de la Courtille avait été fondée autour de 1773. Elle était installée dans la rue de la Fontaine au Roi. Dès ses débuts, elle visait à imiter les porcelaines allemandes de Meissen, la référence absolue dans le domaine en Europe. Elle alla même jusqu’à retenir une marque lui ressemblant, à savoir des épis ou des flambeaux croisés. En effet, la signature de Meissen était une double épée.

Henry Havard dans son traité sur l’ameublement et la décoration indique également que la manufacture cherchait à imiter la production de Chantilly, placée sous la protection du prince de Condé.

Locré en fait même un axe de communication, comme on pouvait le lire dans les Annonces, affiches et avis divers du 10 janvier 1777 :

« Tout ce qui concerne le service à café et le service de table, tant en blanc qu’en bleu et blanc, façon de Chantilly, en blanc et or et en peinture et dorure de toutes sortes de goûts ; des figures en biscuits, pour orner des salons et pour les desserts ; des vases fond bleu ; des déjeuners sur des plateaux de porcelaine de toutes espèces, aussi fond bleu et des tasses à limonadiers ; le tout à des prix très modérés et proportionnés à la richesse et à la perfection des pièces. »

 

Les productions de la manufacture de la Courtille

Pour en savoir plus, plongeons-nous dans La Mode illustrée du 25 décembre 1932 !

« Il y avait au XVIIIe siècle de nombreuses fabriques de porcelaine situées à Paris, l’une d’elles dite ‘de la Courtille’ a laissé les plus jolis exemples fort recherchés à nos jours. Les ateliers installés rue Fontaine-au-Roi étaient dirigés par J. B. Locré, associé à Bussinger, modeleur de Hochst, on y produisait une porcelaine à pâte dure décorée de petits bouquets de fleurs, rubans, guirlandes, couronnes en coloris frais et charmants qui prétendaient rivaliser avec Sèvres. En 1773, Locré avait la commande d’un buste de porcelaine, grandeur nature, de Mme du Barry, copié sur un modèle en plâtre, du prix de 3.000 livres.

« Les objets fabriqués à la Courtille consistaient en boîtes à mouches et à rouge, flacons à parfums, boutons de vestes, bonbonnières, services de tables. En 1795, Russingen succéda seul à Locré, ce fut la décadence. »

En tout état de cause, la production de la manufacture de la Courtille était variée, avec une finesse d’exécution.

 

Les différents fabricants de la manufacture.

Comme nous l’avons évoqué, Jean Baptiste Locré avait fondé la manufacture. Au début des années 1780, il dut faire face comme à ses confrères parisiens des remontrances de la manufacture royale de Sèvres, supportant mal leur concurrent. Aussi, il s’associa à Bussinguer, tout en cessant de décorer et dorer ses pièces.

Puis à partir de 1790, Bussinger poursuivit seul l’aventure, avant de s’allier en 1800 à Pouillat. Ce dernier l’évinça ensuite.

 

Sources bibliographiques :

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