Histoires de Paris

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Histoires de litterature

Le récit des argotiers par Henri Sauval

Le récit des argotiers par Henri Sauval décrit un royaume parallèle avec son roi, ses officiers et ses états généraux

 

Henri Sauval, historien parisien du XVIIe siècle, dédie un chapitre de son Histoire de la ville de Paris, à la cour des miracles. Il revient notamment sur sa localisation mais aussi ses habitants supposés.

Les argotiers y tiennent une place importante.

 

Un royaume à part, dans le royaume

Il les décrit comme les pauvres que les parisiens croisaient dans les foires, les marchés ou devant les églises.

Cette communauté se serait organisée en royaume avec ses propres lois, ses officiers et son langage.

Plusieurs niveaux d’officiers se distinguaient : les cagoux, les archisupots de l’arigot, les orphelins, les marcandiers, les risodés, les malingreux, les capons, les piètres, les polissons, les francs mitoux, les calots, les sabouleux, les hubins, les coquillards, les courteaux de boutanche.

Sauval explique également qu’elle fut lancée par des écoliers de l’Université de Paris. Leur tradition s’inscrirait dans le jargon des merciers des foires de Niort et de Fontenay.

 

 

Le roi ou le grand coësre

A la tête de cette communauté, régnait un roi, le grand coësre, appelé aussi de temps en temps le roi de Thunes.

A son apogée, ce roi recevait tous ceux qui se présentaient à la cour des miracles pour rejoindre la communauté.

Pour devenir roi, plusieurs conditions étaient attendues. Il fallait en effet être cagou ou archisuppôts de l’argot tout en étant capable d’avoir une un bras ou une jambe rongé par la migraine en apparence.

Il portait comme tenue de royauté des haillons mélangeant toutes les couleurs.

 

Tous les ans, le grand coësre tenait ses états généraux, en Bretagne, dans le pré des gueux de Sainte Anne d’Auray à la Pentecôte. Ainsi, tous les officiers des argotiers se rendaient devant lui pour lui présenter leurs hommages. Ils payaient alors les taxes. C’était à ce moment là que les sanctions étaient appliquées. Ces états généraux pouvaient aussi démettre le grand coësre, s’il n’avait pas bien gouverné.

 

L’accueil des nouveaux

Pour leurs débuts, les cagoux enseignaient aux nouveaux venus la fabrication d’une drogue réalisée à partir d’une herbe, l’éclaire, du lait, du sang et de la farine. Cette mixture permettait d’imiter des ulcères et des blessures.

Ensuite, les argotiers préparaient de la graisse pour empêcher les chiens d’aboyer.

On leur apprenait également le langage des argotiers.

 

Les officiers des argotiers.

Revenons sur quelques spécificités des officiers.

Les cagoux étaient les officiers les plus élevés de la hiérarchie. Ils n’acquittaient d’aucun impôt. Les narquois mimaient des soldats blessés à la guerre, traînant une épée sur le côté. Pour leur part, les orphelins mendiaient en tremblotant dans les rues. Ensuite, les marcandiers expliquaient qu’ils étaient d’anciens marchands, ruinés par la guerre, le feu ou un accident. De leurs côtés, les malingreux montraient leur ventre rempli d’ulcère, demandant l’aumône devant les églises prétextant devoir faire un pèlerinage à Saint Méen.

Il arrivait que certains argotiers se liaient une jambe pour mimer une amputation et parvenaient tout de même à réaliser des tour d’adresse.

 

Particularité du récit des argotiers par Henri Sauval

L’important de ce récit était de faire croire à l’existence d’un royaume parallèle, au sein même de Paris et de ses murs. De ce point de vue, l’historien Roger Chartier décrit ce récit comme le plus abouti en la matière.

Il s’inspire très largement du récit réalisé par le Jargon de l’Argot, œuvre très diffusée au début du XVIIe siècle et mettant en avant cette communauté.

Toutefois, Sauval intègre ici quelques compléments. En effet, il insiste davantage sur le rôle des écoliers débauchés dans la constitution de la communauté, pouvant laisser penser une origine parisienne.

En outre, il place le lieu des états généraux en Bretagne, à proximité d’un des grands lieux saints de la région. Dans d’autres récits, ils ont lieu plutôt au sud du royaume.

 

Sources bibliographiques

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