Histoires de Paris

A chaque coin de rue de Paris, des histoires… souvent revues, réadaptées mais fascinantes

Vies de travail

Les bonnetiers

Les bonnetiers, un des membres des 6 Corps, jouirent des plus grands privilèges du Moyen Age à la Révolution.

 

Le bonnet était historiquement un fil de laine tissé à la main avec l’aiguille et la broche : avec le bonnet, on faisait des chapeaux, des gants…

Au XVIe siècle, la laine tissée à la broche, avec un aspect proche de l’étoffe, devient le broché pour devenir ensuite le maillot et le jersey. 

 

 

Une profession exemptée de guet déjà au Moyen Age

Les ouvriers qui fabriquaient les bonnets portaient différents noms au Moyen Age : chapeliers de coton, chapeliers de gan de laine ou de bonnet, gantier de laine, ouvriers de gans, mitainiers, aumussiers… On les retrouve dans les lettres patentes données par Charles V en février 1367, reprenant le Livre des Métiers d’Etienne Boileau

Ces ouvriers devaient selon ces lettres savoir “ouvrer de cisailles et de chardons et fouler sur selles”, puis la couture et l’appareillage. Ils travaillaient la laine, le poil ainsi que le coton. 

La laine qu’ils utilisaient devait être de “droite saison”, c’est à dire tondue entre mi-août et la Toussaint, soit à l’état naturel, soit teinte très adroitement. Le fil était travaillé au touret. 

Cinq ans d’apprentissage étaient requis pour accéder à la maîtrise qui s’achetait 3 sols. 

La communauté bénéficiaient de nombreux avantages

  • dispense de tout impôt de commerce, sauf le poids le roi, 
  • vente facultative au marché ou dans ses boutiques, à l’étalage ou en colportant,
  • exemption du guet. 

En 1387, les chapeliers gantiers fusionnèrent avec les chapeliers de feutre. 

 

Le XVe siècle entre affirmation du nom et exigence de maîtrise de sa richesse

Le nom de bonnetier s’imposa progressivement au XVe siècle pour être indiqué seul dans les bannières voulues par Louis XI en 1467. A cette date, les jurés des bonnetiers sont interdis de visite des marchandises entrant dans Paris et destinées aux merciers. Par ailleurs, la communauté dut alors réduire les dépenses de ses réceptions et des dîners donnés pour la réception des nouveaux maîtres.

 

La réforme du XVIe siècle pour réaffirmer le monopôle face aux merciers

En 1550, Henri II publie de nouveaux statuts :

  • La maîtrise est fixée à 16 sols pour le roi et 32 pour les jurés, avec réduction pour moitié pour les fils de maître.
  • Le chef d’oeuvre est constitué de 2 livres de laine à tisser pour réaliser un bonnet, appelé aumusse, ou deux bonnets “cremyolles”.
  • Les jurés étaient au nombre de 4 et élus par moitié tous les ans. 

A cette date, également les contours du métier sont bien précisés pour marquer une distance avec les merciers : ils avaient le monopôle des bonnets de drap teint en bleu, écarlate, ou en couleur. Chaque maître apposait sa marque sur sa production. En outre, les merciers ne pouvaient vendre les bonnets que par 6. 

Enfin, les bonnetiers continuaient alors à bénéficier de leurs privilèges, en leur qualité de bourgeois “portant le ciel” lors des entrées royales dans la ville. 

 

La place des bonnetiers renforcée au sein des Six Corps, l’élite parisienne

A partir de 1638, la jurande fut élargie à 6 jurés, qui se devaient d’avoir 6 ans de maîtrise.  En 1660, un arrêt du Parlement leur donne la préséance sur les orfèvres, et fixe leur 5e place dans les Six corps, le groupe des bourgeois les plus importants de la ville

A cette date, les bonnetiers sont autorisés à vendre les bonnets de drap, de laine, des bas, gants, chaussons, camisoles, caleçons au métier, au tricot ou à l’aiguille, en soie, laine, coton, chanvre, lin, poil de chameau ou de castor. 

 

La réunion avec les autres communautés de bonnetiers des faubourgs

Au XVIIe siècle, trois communautés tenaient ce commerce : les anciens bonnetiers, 5e des Six Corps, les bonnetiers au tricot installés dans le faubourg Saint Marcel et les ouvriers faiseurs de bas. 

Les bonnetiers du faubourg Saint Marcel tenaient leurs statuts du bailli de Saint Marcel en 1527 et de celui de Sainte Geneviève en 1619. Pour accéder à la maîtrise, l’aspirant devait tricoter à l’aiguille deux bonnets en trois fils de laine et un bas d’estame en fine laine. 

Les communautés furent regroupées en 1701. 

 

Les bonnetiers durent s’acquitter de 36 000 livres pour racheter les offices des jurés en 1691, 26 000 livres pour celles des trésoriers payeurs. En 1745, ils payèrent 45 000 livres pour l’union des offices d’inspecteurs des jurés. 

Leur confrérie, dédiée à Saint Michel, était située dans l’église Saint Martin, dans le faubourg Saint Marcel. Toutefois, selon Savary, ils eurent aussi une autre installée à Saint Jacques de la Boucherie, sous le patronage de Saint Fiacre. 

Enfin, en 1776, les bonnetiers fusionnèrent avec les chapeliers et les pelletiers pour former le 3e des Six Corps. Les chiffres officiels de l’époque dénombraient 443 maisons de bonneterie à Paris, 338 maîtres et 105 veuves. 

 

Sources bibliographiques : 

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